Le hussard noir de la République

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Le hussard noir de la République

Ces jeunes élèves-maîtres « étaient vraiment les enfants de la République…ces hussards noirs de la sévérité ». Charles Péguy – L’argent- 1913

 

Raymond Peltier est né le 8 mai 1889 à Arrembécourt dans l’Aube, de Léonide Peltier et Esther Charton.  Il restera enfant unique.

En 1890, la famille s’installe à Somsois, à 15 km bien que dans un département différent, la Marne, où Léonide est cordonnier et Esther couturière.

Elève brillant de l’école primaire de garçons, il passera son certificat d’études à Sompuis en 1901 (mention Bien) puis, le brevet élémentaire en 1905, à Châlons en Champagne (reçu 2ème). C’est là qu’il présentera le concours d’admission à l’école normale d’instituteurs où il sera reçu troisième mais premier à l’écrit. Il y passera le brevet supérieur, ce qui correspond à notre baccalauréat, puis le certificat de fin d’études normales en 1908.

Le voilà instituteur adjoint à Vitry-le-François où il passera le certificat d’aptitude pédagogique en 1911. Jusqu’en 1935, il enseignera à Reims, à l’école de garçons Clairmarais puis sera directeur de l’école du Petit-Bétheny et obtiendra le titre d’officier d’académie. Après l’évacuation dans le Sud Ouest en 1914, pendant le temps de guerre, il retourne à Reims, directeur de l’école rue Fléchambault. L’heure de la retraite sonnera en 1945.

Mais revenons sur son parcours.

En 1910, Raymond est bon pour le service. C’est sur le registre matricule que se trouve sa description physique : 1m70, cheveux noirs, yeux gris, front haut, nez grand, bouche moyenne, menton rond, visage ovale.

Il participe au stage des instituteurs à l’école de gymnastique de Joinville le Pont mais atteint d’une malformation cardiaque, il est réformé.

C’est en août 1913 qu’il épouse Thérèse Labau, institutrice à Rilly la Montagne, près de Reims. De cette union naîtront 4 enfants : en 1914 Ivan Georges, qui décèdera l’année suivante, en 1916 Ivan Raymond, mon père, puis en 1918 Gabrielle et enfin en 1920 Yves René qui ne vivra que quelques mois.

En 1914, évacué en Gironde avec sa femme, alors enceinte, il se met à la disposition de l’Inspecteur d’académie de Bordeaux. Ils logent chez la tante de Thérèse au château de Fargues Saint-Hilaire. De retour dans la Marne,  il est mobilisé dans le service auxiliaire en qualité de moniteur d’instruction physique et de préparation militaire puis directeur des « cours des illettrés », enfin, affecté au service postal. Il termine la guerre au CRIP de Boulogne sur Mer comme moniteur d’EPS.

Enfin démobilisé, il retrouve ses chers élèves à l’école Clairmarais.

C’est là que va démarrer une riche vie de militant.

Entre 1921 et 1923, il est élu secrétaire de l’amicale des institutrices et instituteurs de Reims, président de l’association espérantiste (en effet, il parlait l’espéranto), secrétaire du comité rémois de secours à la Russie affamée, élu membre du conseil de la section rémoise de la Ligue des Droits de l’Homme, élu membre du conseil syndical et secrétaire administratif du  Syndicat National des Instituteurs. On peut rajouter quelques articles dans la presse locale « l’Eclaireur de l’Est », puis, élu membre du comité de la section de Reims du Parti Socialiste, trésorier de la ligue rémoise de la Libre Pensée dont il est le délégué au congrès national à Strasbourg.

Il fait sa première conférence à la bourse du travail sur les salaires et participe au congrès du syndicat des instituteurs à Paris en 1927.

En 1930, c’est une nouvelle conférence à la Bourse du Travail qui sera éditée en brochure : « l’instituteur, l’école laïque ». Il est même élu vice président de la chorale mixte universitaire de Reims.

 En 1931 membre du conseil départemental de l’enseignement primaire, délégué au congrès de la Ligue de l’Enseignement à Paris, délégué au comité de la paix de Reims. En 1932, élu délégué sénatorial par le conseil municipal de Reims, délégué aux états généraux du travail à Paris.

En 1936, secrétaire du comité de vigilance des intellectuels antifascistes, élu secrétaire de l’union départementale des syndicats ouvriers CGT de la Marne.

En octobre 1940, il figure sur une liste de 80 otages exigés par la Kommandantur.

En 1946, il est présenté par la SFIO et élu grand électeur au Conseil de la République.

1947 rédacteur en chef du « Travail ».

1948 décoré de la médaille d’or de l’Académie du Dévouement National. Elu secrétaire du cercle Jean Jaurès de Reims.

Tout est consigné dans des cahiers : coupures de presse, courriers, invitations…

Souvent absent de la maison en raison  de son activité débordante, les scènes de ménage ne manquaient pas. C’était aussi un gros fumeur. Il roulait les cigarettes de tabac gris. J’ai retrouvé des tableaux dans lesquels il notait le nombre de cigarettes fumées par jour lorsqu’il avait l’intention d’arrêter.

Il meurt le 9 février 1951 à 61 ans d’une maladie qui le paralysait peu à peu.

« …au sein de notre organisation dont il fut un dirigeant à l’autorité souriante et reconnue par tous, il fit toujours preuve du plus large esprit de compréhension. Raymond Peltier jouissait d’un prestige certain. C’est lui qui, au congrès du Syndicat National en 1938, lança à ceux qui magnifiaient l’esprit capitulard, que le corps des instituteurs préférait la mort à la servitude. » (Syndicat des Instituteurs)

 

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